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take away shows — By Chryde

Tobias Jesso Jr

Je n'ai d'abord vu qu'une photo de lui. Un échalas face à un mur blanc, avec trop de bouclettes sur la tête. Il était 24e d'un énième top 25 des artistes à surveiller, je ne sais même plus sur quel site. On était au mois de janvier, j'ai cliqué.

J'arrivai sur YouTube, face à la photo d'un gamin en pyjama sur laquelle était collée une chanson un peu mordue sur les bords, où l'on devinait encore le mouvement qui avait déposé ça et là quelque poussière, une petite patine, un souffle à l'ancienne. Un piano, une voix, et cette chanson qui aurait pu tout être, une démo d'il y a quarante ans qui n'aurait jamais vu la lumière, une balade enregistrée timidement, et qui n'aurait jamais été envoyée aux oreilles auxquelles elle était promise. On pensait à plein de noms, on pensait à tous ces garçons qui, au fil des décennies, avait su faire tenir leur voix en équilibre fragile sur un accord mineur. On pensait à John, Harry, Elton... Qu'elle ait été écrite par un gamin d'aujourd'hui ou sortie de la cave d'un vieux disquaire, qu'importait après tout, cette chanson était une évidence, quelle que soit l'histoire qu'on voulait y coller. Elle s'appelait 'Just a dream'. Après une centaine d'écoutes, je l'évoquais sur le Facebook de la Blogo.

Quelques mois plus tard, je reçois un mail d'un contact américain, qui me demande qui est en charge du Facebook de la Blogo, sur un ton presque froid. Il veut savoir qui a écrit ce post sur Tobias. M'explique que le garçon a été signé chez True Panther, qu'il vit à Vancouver, qu'il faut le filmer. Il est à Los Angeles dans quelques jours, on a quelqu'un là-bas ?

Oui, il y a Arturo là-bas. Vite, on y cherche un piano, passons en revue des villas prétentieuses, des espaces bien trop blanc, bien trop lumineux, avant de tomber sur ce bar. Ce bar sombre, qui n'a pas été entrenu au delà du nécessaire, un endroit resté dans son jus, éclairé par quelques néons et par la maigre lumière que laissent passer d'épais blocs de verre. Ce bar où à part le téléviseur qui est devenu plat, tout est resté un peu comme il y a dix ans, vingt ans, trente ans, où les deux vieux hommes au comptoir ne sauraient dire depuis combien de temps ils viennent tous les après-midi.

C'est dans cet endroit, à la lumière douce, la poussière diffuse, aux sons étouffés, que Tobias, avec ses bouclettes et ses mimiques, a chanté ces chansons sans âge. Et c'était comme vous le voyez. Un moment intemporel, que vous pourrez associer à ce qui accrochera le plus, en vous, à d'intouchables mélodies. Elles ont imprégné ces murs. Elles vont durer longtemps, on en est sûrs.