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take away shows — By François Clos
Directed by
David Ctiborsky
In Paris

Buck 65

Dix ans que j'ai vu Buck 65 en concert. À l'époque il avait scotché la salle, seul au mic, au MiniDisc et aux platines. J'étais fan des morceaux fleuves de « Square », de l'efficacité redoutable de « The Centaur » ou « 4 6 3 », j'étais revenu conquis par son live. Bien qu'ayant suivi avec intérêt la suite de l'aventure, louvoyant vers des sons plus rock (avec Tortoise en backing band, tout de même), j'imaginais benoîtement Buck 65 redevenant le kid mordant de ses premiers disques le temps d'un Concert à Emporter, avec Ghetto Blaster et mecs qui tapent la coupole sur le parvis de l'Opéra Bastille. Un fantasme, en quelque sorte.

Car Buck 65 est autre. Un dandy, un gentleman aux mots précis, joueurs, mais maîtrisés, efficaces, sans effort apparent. Pas de B-boys tournoyants mais un ancien mannequin à la voix rêveuse, pas de ghetto blaster mais un iPod glissé dans une timide enceinte portative – il y avait tout de même ces énormes piles rondes à glisser dedans, comme un lointain souvenir du mythe. Buck 65, formidable sur scène, se retrouvait là devant une audience peu concentrée, à l'exception de trois sympathiques lycéennes sagement assises à deux pas, tout ce petit monde vaguement intimidé, sans savoir de quoi les prochaines minutes seraient faites. Mais une fois l'instru lancé, plus de doute.

Il y a eu, évidemment, cette complicité évidente entre elle et lui. Il y a eu également, un embryon de malice à l'égard des lycéennes. Mais il y a eu, surtout, cette diction imparable, ces évocations bigarrées (Rossi de Palma, tout de même !), bref tout ce que Richard Terfry sait faire de mieux : rapper. Je l'imaginais en MC débridé et j'avais tort, je les voyais en couple et j'étais heureux. Pas de supercherie, pas de pose, pas de bouffonnerie : juste deux personnes qui demandaient à être mises, l'espace d'un instant, entre parenthèses.

Le bassin de l'Arsenal s'est imposé naturellement, à l'abri de la circulation et de la foule. Nous étions de moins en moins présents ; la musique, elle et lui marchaient sur le ponton, écoutés seulement par les bateaux sagement amarrés. La journée finissait froidement, dans une lumière blanche parfaite pour « Cold Steel Drum », des passants étranges ont croisés notre route, effleurés la bulle de Buck 65 et de celle qui lui a donné la réplique, mais sans jamais vraiment en saisir la portée. Un jour ordinaire à Paris.

Buck 65 en concert au Nouveau Casino demain, le 12 Avril 2011.