Et puis on avait vu ce duo, au nom improbable, Zarigani $, avec leur look excentrique et leur formule inédite : une batterie et une basse branchée sur trois amplis. Excitant, et quasi impossible en concert à emporter… Un premier contact est pris, à coups de traduction automatique, et avec l’aide d’un ami expatrié. Et une formule est trouvée.
Sous des trombes d’eaux, nous prenons un métro jusqu’à une lointaine banlieue, à minuit. Elles nous attendent, avec des robes assorties sous leur parapluies, et nous marchons avec elles jusqu’à Cloud Nine, leur studio de répétition. Le proprio les a autorisées à sortir leur barda dans le hall, c’est tout ce que nous avons, tout ce que nous pourrons faire.
Le studio est au troisième étage et, comme un peu partout au Japon, l’ascenseur ouvre directement sur la pièce. Oh merveille. Une reproduction fidèle et kitchissime d’un diner américain.
François nous regarde un brin paniqué. Comment prendre le son, avec son matos et tant d’amplis, tant de bruit à venir. «On va la faire à la sauvage, à la Take Away…» se contente-t-il de dire, avant d’installer des micros un peu partout, alors que les filles reviennent avec des lunettes fantasques, et de l’énergie à revendre. Il est pas loin d’une heure du matin, nous sommes épuisés, elles vont nous réveiller.
Deux choses furent confirmées ce soir là : un, on peut vite se sentir perdu au Japon, dans l’impossibilité de communiquer quoi que ce soit, quand les quatre personnes en face de vous ne parlent pas un mot d’anglais et se servent de la fonction ‘traduction’ de leur téléphone pour vous faire comprendre quelque chose. Deux, la musique n’a que faire de ces considérations. Quand la basse des Zarigani a commencé à vrombir, quand elles ont lancé leur punk de filles ludique, pas besoin de savoir quelle langues elles parlaient. Il suffisait de secouer la tête. Elles nous donnèrent l’énergie dont nous avions besoin ce soir là. Dans l’heure de taxi qui suivit, nous nous endormirons, la caméra allumée qui filme la pluie.